
Les souvenirs d’un commerçant engagé
Les souvenirs d’un commerçant engagé
Natif d’Ollon, Gustave Duc a été le premier de son village à fréquenter l’École de commerce et… à posséder une voiture ! Affable, volubile, doté d’une prodigieuse mémoire, il raconte son parcours qui l’a conduit d’une modeste épicerie à l’ouverture d’un magasin de sport.
Dans les années soixante, Duc-Sports habillait et équipait en matériel de ski les hôtes de Crans-Montana. Italiens, Français, Anglais affluaient, attirés par la nouvelle mode des sports d’hiver. Période glorieuse du boom touristique du Haut-Plateau : Gilbert Bécaud y possédait un chalet et l’on pouvait croiser Aznavour, Lino Ventura ou Michèle Morgan dans les rues de la station.
La carrière de Gustave Duc démarre à Ollon où il tient une petite épicerie. Un séjour dans une fabrique d’habits à Berne, en 1950, va lui donner l’idée d’ouvrir un magasin de confection. À cette époque sans voiture ni transports publics, les déplacements se faisaient à pied. Comment réduire les distances pour atteindre la clientèle ? Le commerçant opte pour la livraison à domicile : un pionnier, avant les camions Migros !
Au volant de son automobile, il sillonne les villages de la Noble et Louable Contrée avec son assortiment de salopettes, vestons, chaussettes et autres vêtements. « Je n’étais à la maison que vers 22 heures. Et le magasin d’Ollon ne fermait pas à midi. Je faisais des journées de seize heures… Mais pour le bonheur et la satisfaction de mes 300 clients », lance Gustave Duc qui souligne le soutien indéfectible de son épouse Monique pour gérer les activités commerciales.
AU SERVICE D’AUTRUI
La construction d’un immeuble en plein centre de Crans ouvre d’autres perspectives. Il y acquiert un local qui deviendra Duc-Sports, célèbre enseigne. Pour ce nouveau commerce, il engage l’excellent vendeur d’un concurrent. « À la veille de Noël 1960, nous étions une dizaine d’employés pour faire face à l’afflux de clients qui faisaient la queue devant le magasin. » Comment expliquer ce succès ? « Un bon commerçant doit être un conseiller. Il faut accorder les couleurs avec un certain sens de l’esthétique vestimentaire. C’est un don : j’avais cela dans la peau. »
Mais Gustave n’a pas été que commerçant. Excellent golfeur, il a présidé les Seniors du Golf-Club de Crans-sur-Sierre. « C’est le seul club au monde où le cantonnier côtoie le riche industriel », souligne celui qui a pratiqué ce sport jusqu’à ses 90 ans ! Et d’exprimer sa fierté envers son fils Joël qui fut champion d’Europe junior avec l’équipe de Suisse.
Homme engagé, notre nonagénaire a été juge de commune et a encore présidé la Vie Montante (mouvement catholique du 3e âge). Quel est donc le secret de sa santé ? « J’ai eu la chance de vivre septante ans avec une épouse merveilleuse. Et j’ai observé une certaine hygiène de vie. Avec mon job, je n’avais pas le temps de courir les bistrots ! » Et de raconter cette anecdote significative. Après avoir vendu son auto à un ami, il s’enquiert : « Alors comment va ma voiture ? » Réponse du copain : « Elle roule très bien… Mais je ne comprends pas, elle ne s’arrête jamais devant les cafés ! »
À 96 ans, Gustave Duc jouit d’une solide santé. Il conduit encore sa voiture et choie une famille nombreuse.
Légende photo: Le parcours de Gustave Duc force l'admiration. ©Luciano Miglionico